L’éducation, leur priorité
Le secteur éducatif apparaît comme la priorité de la branche française des Frères musulmans, assure le rapport. Des campagnes numériques prônent la déscolarisation des enfants musulmans, l’école laïque étant présentée comme la matrice de l’islamophobie. Le nombre d’élèves inscrits auprès d’organismes d’enseignement à distance et les atteintes à la laïcité sont en augmentation. En septembre 2023, sur 74 établissements confessionnels musulmans (+ 1000 élèves inscrits ces deux dernières années) recensés sur le territoire accueillant 12 513 élèves, 21 établissements liés à la mouvance des Frères musulmans (18 directement et 3 réputés proches) accueillent 4200 élèves pour l’année scolaire en cours. Et sur les 815 écoles coraniques recensées début 2024 (hors Outre-mer et Paris) « qui se caractérisent par l’opacité de leur fonctionnement », rattachées à un lieu de culte pour la quasi-totalité d’entre elles, plus d’un tiers évoluent dans un courant fondamentaliste de l’islam. 114 sont rattachées aux Frères musulmans. Au lycée Averroès à Lille, le rapport relève des carences graves parmi les ressources pédagogiques mises à disposition des élèves en classe de SVT et de musique, ou au centre documentaire, et pointe la présence d’ouvrages aux contenus contraires aux valeurs républicaines et la prééminence des lois divines sur toute autre. ■ Esther Amar
L’économie hallal, un puissant levier
Le rapport indique que la KT Bank, première banque islamique d’Europe installée en Allemagne, est la structure pivot du financement des principales associations de Musulmans de France. « L’islamisme identitaire véhiculé, anti-républicain mais respectant la réglementation, est un facteur de séparatisme qui offre des opportunités aux entrepreneurs de l’économie de l’islam », soulignent les auteurs. Le discours des Musulmans de France veut préserver la religion contre une assimilation des musulmans dans un espace sécularisé par la promotion de la finance islamique, le port du voile et la mise en place d’une filière hallal. « Le hallal, qui distingue le pur de l’impur,est un des meilleurs outils pour favoriser le séparatisme. Le danger est son extension presque illimitée », alertait déjà Florence Bergeaud-Blackler dans Marianne en février 2020. Qualifié dans le rapport de « clé de voûte » de la confrérie en Europe, le Conseil des musulmans européens (CEM) a pour volonté d’influencer les institutions européennes, entre autres, par le déploiement de la filière hallal en Europe. NDLR : après la diffusion par l’association L214 de vidéos montrant des animaux agoniser dans de terribles souffrances et suite à une plainte pour actes de cruauté (signalements dès 2016), le préfet vient d’ordonner la fermure de l’abattoir hallal Aminecov situé à Meaux. ■ E.A.
La surface d’influence des prédicateurs 2.0
La mouvance frériste pratique en permanence la stratégie du double discours et de la victimisation (« on dit ça, on ne dit rien »), et sa quête de respectabilité passe notamment par l’activisme d’une nouvelle génération de prédicateurs sur les réseaux sociaux pour diffuser l’islamisme et grossir les rangs de la confrérie. Ces militants radicaux sont d’ailleurs la « première porte d’entrée avec les jeunes francophones européens », indique le rapport, qui estime à une vingtaine le nombre d’influenceurs ayant un réel impact sur les réseaux (Youtube, TikTok, Instagram, Facebook). L’étude pointe deux faits nouveaux : d’abord, l’hybridation entre les prédicateurs 1.0 et 2.0, autrement dit la complémentarité, voire la « concurrence » (sic), entre ces influenceurs à la communication moderne et stylée et les prédicateurs religieux traditionnels. Ensuite, leur approche transactionnelle à visée lucrative : à leur intégrisme religieux s’ajoutent un certain nombre de services marchands correspondant aux attentes d’un public captif. « L’islamisme identitaire ainsi véhiculé, foncièrement anti-républicain,tout en respectant la réglementation, offre aux entrepreneurs des possibilités d’enrichissement ». ■ Yaël Scemama
Des structures bien implantées localement
Le manque persistant de structuration de l’organisation du culte musulman, conjointement à sa vitalité démographique, donne toute latitude aux activistes islamistes et à leurs menées subversives, précise le rapport. Du pain béni pour la confrérie qui se sert des mosquées comme de points d’ancrage locaux autour desquels se développent des réseaux d’associations satellites : écoles coraniques, clubs sportifs, services sociaux, etc. L’association « Musulmans de France », branche nationale des Frères musulmans (ex-UOIF), gère 139 lieux de culte sur tout le territoire, auxquels s’ajoutent 68, considérés comme proches de la fédération, répartis sur 55 départements, soit 7 % des 2 800 lieux de culte musulman en France. La fréquentation des mosquées affiliées ou proches de la mouvance, s’élève en moyenne à 91 000 fidèles le vendredi.L’association « Musulmans de France » revendique la propriété en propre, ou dans le cadre d’une SCI avec l’association locale, de 26 lieux de culte. Son budget annuel – selon ses dires, précise le rapport – est de 500 000 euros par an, en diminution de moitié depuis cinq ans. ■ Y.S.
L’obsession du conflit israélo-palestinien
Les Frères musulmans carburent à l’antisionisme. Laissons parler le rapport. « Le conflit israélo-palestinien agit comme un catalyseur de l’antisionisme historiquement porté par la confrérie et de mutation en antisémitisme au sein de la mouvance, à la faveur de cinq ressorts : l’argumentation complotiste, la reductio ad Israël (faisant l’amalgame entre Israéliens et Juifs, l’idée d’une identité musulmane irréductible, d’une inimitié naturelle entre Juifs et musulmans et, enfin, les cas d’opinions irrationnelles. Viscéralement antisioniste, Hani Ramadan, fils de Saïd et frère de Tariq, fait état publiquement d’une hostilité à Israël qui verse vers un antisémitisme explicite. S’il a condamné les attentats terroristes, il légitime toutefois à de nombreuses reprises le djihad armé et les actions du Hamas, allant jusqu’à appeler à s’engager en soutien au mouvement de résistance palestinien ». ■ Y.S
Le Hamas, branche palestinienne des Frères musulmans
Le rapport consacre une part significative, dans un encadré tramé distinct du texte, à expliciter les liens entre les Frères musulmans et le Hamas, sa branche palestinienne. « Le Hamas, créé en 1987, est issu et demeure connecté à la mouvance des Frères musulmans. Dans le contexte de la fin de la Seconde Guerre mondiale, la question de la Palestine a constitué un catalyseur décisif pour la confrérie qui appelle à la fin de l’immigration juive en Palestine. Saïd Ramadan (père de Tariq – Ndr) organise en 1953 à Jérusalem le « Congrès islamique de Jérusalem pour la Palestine », au cours duquel est fixé un principe de solidarité mondiale contre le sionisme. A partir des années 80, les Frères musulmans palestiniens se séparent de la confrérie internationale et établissent leur propre mouvement lors de la première Intifada en 1987. Il est baptisé Hamas (mouvement de résistance islamique) et, malgré sa séparation avec la structure internationale, la charte du nouveau mouvement mentionne un rattachement explicite aux Frères musulmans ». ■ Y.S.
La reconnaissance par la France de la Palestine
Malgré leur sombre tableau, les rapporteurs estiment néanmoins qu’il faut « adresser des messages forts » à la population musulmane. « Indépendamment des mesures évoquées dans le présent rapport, qui permettraient de réaffirmer que la foi et la culture musulmanes sont aussi respectables que les autres et que la République en garantit le libre exercice et la libre manifestation, la reconnaissance par la France d’un État palestinien aux côtés d’Israël dans des frontières sûres et reconnues pourrait être de nature à apaiser ces frustrations ». ■ Y.S.